Nouvelle droite (Racisme)

NOUVELLE DROITE

 

Déjà pour les dirigeants nazis la culture représentait l’enjeu essentiel du combat idéologique. Pour la Nouvelle Droite, la prise du pouvoir culturel est le tremplin obligé vers le succès politique. Cette stratégie culturelle ou « méta-politique » s’est affirmée après l’échec politique, dans les années 1960, d’Europe Action, du Mouvement Nationaliste du Progrès (M.N.P.), du Rassemblement Européen de la Liberté (R.E.L.), de Jeune Nation, de la Fédération des Etudiants Nationalistes, groupes et partis d’où émergeront les revues Nouvelle École, Éléments, le Club de l’Horloge et les Éditions Copernic.

Cette guerre culturelle est facilitée par « la vulnérabilité, elle aussi grandissante, de l’opinion publique à un message métapolitique (qui est) d’autant plus efficace et d’autant mieux reçu et assimilé que son caractère directif et suggestif n’est pas clairement perçu comme tel, et par conséquent, ne se heurte pas aux mêmes réticences rationnelles et conscientes qu’un message à caractère directement politique » (Les idées à l’Endroit, p. 258, A. de Benoist).

Le G.R.E.C.E. ou Groupement de Recherche et d’Études pour la Civilisation Européenne a été officiellement fondé le 17 janvier 1969. Le premier numéro de la revue Nouvelle École est paru, lui, déjà en février-mars 1968 avec pour thème le conflit fondamental entre Rome et la Judée : procès du monothéisme et des idéologies égalitaires, appel à la « libération païenne », exaltation des inégalités, retour aux « sources indo-européennes » et scientisme raciologique.

Déjà constitué officieusement en 1965, le G.R.E.C.E. s’est nourri du « réalisme biologique » d’Europe Action, revue de réflexions nées après l’échec de l’O.A.S., dans laquelle on pouvait lire par exemple : «Une civilisation est le produit d’une race ; seule la race qui l’a créée est capable de la maintenir dans sa voie naturelle de développement ».

La généalogie intellectuelle de la Nouvelle Droite s’inscrit dans l’héritage issu de la Ligue Nordique, créée par l’anthropologue britannique R. Pearson en 1958, et à laquelle adhéra immédiatement H. Günther, théoricien raciste officiel du régime nazi, ainsi que d’autres nostalgiques du racisme. Dans les années 1960, c’est autour de la revue Mankind Quarterly que se regroupèrent les partisans de l’idéal « aryen », de l’hygiène raciale (ou eugénisme), des idées à la fois de l’extrême droite américaine et des théoriciens fascistes, anciens nazis ou mussoliniens, des supporters du régime raciste de l’Etat sud-africain et les héritiers idéologiques de G. Vacher de Lapouge, de Gobineau, de Drumont et du darwinisme social. « Nouvelle école », comme ses homologues étrangers, comprend à la fois d’anciens militants extrémistes de droite (des pro-nazis ou d’anciens nazis), et des universitaires de renom qui offrent, quelquefois même sans s’en rendre compte peut être, une couverture académique à ces publications. Michael Billig, montre bien le réseau de relations internationales et l’interférence entre l’université et l’extrémisme politique. The Mankind Quarterly en Grande-Bretagne, Neue Anthropologie en Allemagne et Nouvelle école en France s’échangent des textes et partagent la même idéologie et des théories tel l’eugénisme de Galton (élitisme, principe hiérarchique, neutralisation du « déchet » social) dont K. Pearson recueillit l’héritage et qu’il transmit à ses élèves, parmi lesquels Cyril Burt, connu pour ses travaux sur le QI. D’autres professeurs de psychologie comme H. Eysenck et A. Jensen offrent aux organisations d’extrême droite le discours « scientifique » sur la race dont ils ont besoin pour affirmer leur postulats racistes. Norman Cohn note dans son livre : « Si irrationnelles, anti-scientifiques et notoirement absurdes qu’aient été ces doctrines, elles furent l’œuvre de gens cultivés, et, plus exactement, de gens diplômés » (Histoire d’un mythe, Gallimard, 1967, p. 172).

Le comité de patronage de Nouvelle Ecole comprend de nombreuses personnalités du monde de la nouvelle droite internationale : K. Pearson mais aussi un ancien collaborateur d’Himmler, des membres de la Ligue Nordique, des rédacteurs de la revue Mankind Quarterly, l’auteur d’un opuscule contre l’intégration des Noirs aux Etats-Unis, le fondateur de la Société sud-africaine de génétique et collaborateur du Journal des affaires raciales, etc.

A côté d’une nouvelle droite intellectuelle et « culturelle » affirmant le retour aux « racines indo-européennes » et une idéologie inégalitariste, on trouve aujourd’hui le courant du « révisionnisme » historique niant le génocide commis par l’Allemagne nazie (en contact avec la Nouvelle Droite sans s’y confondre) ainsi que des organisations de combat para militaires, habilement cachées derrière un fascisme aux allures cultivées et « douces ».

 

 

Lecture

 

–       Michael BILLIG, L’Internationale raciste. De la psychologie à la « science » des races, Paris, Petite collection Maspero, 1981.

–       Julien BRUNN, La Nouvelle Droite, Paris, Nouvelles Editions Oswald, 1979.

–       Yves PLASSERAUD, « La Nouvelle Droite fait son chemin » in Esprit, juillet 1983, p. 51-67.

–       Alain SCHNAPP et Jesper SVENBRO, « Du nazisme à ‘ Nouvelle école’ : repères sur la prétendue Nouvelle droite » in Quaderni di storia, 11, 1980, p. 107-119.

–       Pierre-André TAGUIEFF, « La ‘nouvelle droite’ contre le libéralisme », in Intervention, n°9 1984, p.31-43.

 

Cf. Eugénisme, Génocide.

 

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