Vacher de Lapouge peut être considéré comme un des pères du racisme moderne et de l’antisémitisme. Pour lui, seule la race blanche aryenne (grand blond aux yeux bleus, dolichocéphale) est capable de génie et de grandeur. Il rêvait d’une solution « sûre, économique » pour se débarrasser de ces « abominables brachycéphales » et avait même songé à leur faire distribuer gracieusement de l’eau-de-vie ! Comme Galton, il estime néfaste l’aide sociale aux déshérités. « Les assistés sont, en règle, des héréditaires de la paresse et de la débauche, parfois du crime. Ce sont des antisociaux vivant en marge de la société, à peu près impropres au travail soutenu, incapables de prévoyance, des primitifs soustraits par le parasitisme à la sélection qui a fait sortir les populations entières du vieux fond antérieur à la civilisation… » (Les sélections sociales, 1896).
Il oppose le dolichocéphale audacieux et bientôt « maître incontesté de la terre » grâce à sa « hardiesse sans limites, son intelligence puissante » et « sa conscience de la solidarité de race » au brachycéphale « inerte, médiocre » , frugal, qui cherche la richesse plutôt que le progrès, « le cercle de ses visées est très restreint ». Mais le rival le plus dangereux de l’aryen dolichocéphale, c’est le Juif « arrogant dans le succès, servile dans le revers, filou au possible, grand amasseur d’argent, d’une intelligence remarquable et cependant impuissante à créer » (L’Aryen : son rôle social, 1899).
Comme on le voit, la notion de race sert surtout à justifier la place de chacun dans la société et a éliminer les concurrents. Elle permet de rationnaliser les préjugés de classe et les préjugés xénophobes.
Vacher de Lapouge dont Guillaume II disait « Vous n’avez qu’un grand homme en France et vous l’ignorez », sera très écouté en Allemagne où le mythe de la supériorité aryenne fut évidemment très bien accueilli et trouva dans les théoriciens de l’Allemagne nazi des disciples trop zélés.
Avec des accents prophétiques, Georges Vacher de Lapouge annonçait fort calmement, en 1887, les massacres à venir : « Je suis convaincu au contraire qu’au siècle prochain on s’égorgera par millions pour un ou deux degrés en plus ou en moins dans l’indice céphalique. C’est à ce signe, remplaçant le shiboleth biblique et les affinités linguistiques, que se feront les reconnaissances de nationalité. (…) et les derniers sentimentaux pourront assister à de copieuses exterminations de peuples ». (Revue d’Anthropologie, 16, 1887, p. 150-151).
Lecture
- Léon POLIAKOV, Le Mythe aryen, Calman-Lévy, 1971.
Cf. Aryen, Galton
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