Protocoles des Sages de Sion

PROTOCOLES DES SAGES DE SION

D’abord rédigé en français, ce faux célèbre confectionné dans les milieux parisiens de la police secrète du Tsar (l’Okhrana), entre 1894 et 1899, est un plagiat qui décalque un pamphlet anti-bonapartiste de Maurice Joly. Ces Protocoles des Sages de Sion furent ensuite publiés sous forme de feuilleton dans un quotidien de Saint Petersbourg Znamya (le drapeau) du 26 août au 7 septembre 1903. Son directeur, Pavolachi Krouchevane — qui quelques mois plus tôt déclenchait le sanglant pogrom de Kichinev — affirmait qu’ils constituaient les procès-verbaux de conférences sionistes tenues en France. Ce n’est qu’en 1917 que Nilus , un autre éditeur russe des Protocoles, prétendra soudain que « ces Protocoles ne sont rien d’autre qu’un plan stratégique pour conquérir le monde et le placer sous le joug d’Israël, … (plan) présenté au Conseil des Sages par le « Prince de l’Exil », Théodore Herzl, lors du premier Congrès sioniste, convoqué par lui à Bâle en 1897 ».

C’est au Times de Londres que revient le triste privilège d’avoir lancé mondialement ces Protocoles en publiant le 8 mai 1920 un article intitulé le Péril juif dans lequel était présenté le livre The Jewish Peril. Protocols of the Learned Elders of Zion. Quinze mois plus tard, le Times dénonce ce texte comme un plagiat. Les 16, 17, et 18 août 1921, Philippe Graves, correspondant à Constantinople, publie en effet l’histoire de sa rencontre avec un émigré russe qui avait découvert, parmi de vieux livres rachetés à un ancien officier de l’Okhrana, Le dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu de Maurice Joly. Saisi par l’incroyable similitude entre le pamphlet de 1864 et le texte des Protocoles, et persuadé du plagiat, le monarchiste russe alerta le journaliste anglais.

Cette dénonciation mit fin à la polémique en Grande-Bretagne mais accentua davantage encore la célébrité de ce faux qui depuis n’a cessé d’être publié partout dans le monde, d’Amérique latine au Japon ou dans les pays arabes, jusqu’aujourd’hui. Comme l’expliquait le Père Charles, ce lucide Jésuite belge qui fut le premier à proposer une analyse définitive de ce plagiat, pour les adversaires des Juifs « la question de l’authenticité des Protocoles était tout à fait vaine, parce que, même faux, ces Protocoles restent vrais ».

 

Lecture

 

  • Norman COHN, Histoire d’un mythe. La « conspiration » juive et les Protocoles des Sages de Sion, Paris, Gallimard 1967.
  • Maurice OLENDER, « La chasse aux ‘évidences’. Pierre Charles (s.j.) face aux Protocoles des Sages de Sion » dans Le Racisme. Mythes et sciences. Pour Léon Poliakov. Bruxelles, Complexe 1981, p. 221-245, (éd. M. Olender).

 

 

Cf. Antisémitisme, Dreyfus, Pogrom.

 

Article extrait du livre de Lydia Flem, Le Racisme, M.A.éd, préface de Léon Poliakov, 1985 (épuisé).

Pogrom (Racisme)

POGROM

 

Les premiers pogroms contre les Juifs russes eurent lieu dans la confusion qui suivit l’assassinat d’Alexandre II, en mars 1881, par les membres d’une petite organisation révolutionnaire Narodnaïa Volia. Au lendemain de cet attentat, quelques grands-ducs et officiers de la garde mirent sur pieds une organisation contre-terroriste, la « Sainte légion », dont un des buts fut de susciter des pogroms. Après cette période d’agitation, les Juifs continuèrent d’être utilisés comme des boucs émissaires commodes ; c’est ainsi que pour la première fois première fois, l’antisémitisme fit officiellement partie de la politique d’un gouvernement.

Au cours de la Semaine sainte de 1881, éclatèrent des pogroms à Elisavetgrad puis à Kiev et Odessa. « Les émeutes antisémites eurent lieu à jour fixe, presque partout selon les mêmes procédés, pour ne pas dire suivant le même programme. Elles débutaient pas l’arrivée de bandes d’agitateurs apportés par les chemins de fer. Souvent, on avait, dès la veille, affiché des placards accusant les Juifs d’être les auteurs du nihilisme et les meurtriers de l’empereur Alexandre II. Pour soulever les masses, les meneurs lisaient, dans les rues ou dans les cabarets, des journaux antisémites dont ils donnaient les articles comme des oukazes ordonnant de battre et de piller les Juifs (…) Plus d’une fois, les Juifs qui tentèrent de se défendre furent arrêtés et désarmés : ceux qui osèrent monter la garde à la porte de leur maison, le revolver à la main, étaient poursuivis… » (A. Leroy-Beaulieu, L’Empire des tsars et les Russes, Paris 1898, t. III, pp. 614-619, cité par L. Poliakov).

En mai 1882 des décrets établirent un numerus clausus limitant l’accès des Juifs à l’enseignement secondaire et supérieur ; il leur était également interdit de résider à la campagne ou dans certaines villes. Tout ceci conduit un grand nombre de Juifs à émigrer alors vers les Etats-Unis. Une autre réaction aux pogroms fut la naissance d’un mouvement sioniste, mais aussi la constitution d’un parti ouvrier juif, le « Bund », qui fut critiqué par Lénine comme « réactionnaire » parce qu’il revendiquait une spécificité juive en plus de son programme socialiste.

Une deuxième vague de pogroms, plus sanglante, s’abattit sur les Juifs à partir de 1903. Le meurtre d’un adolescent fut attribué par la rumeur publique aux Juifs et des appels à la vengeance furent distribués dans les débits de boisson de Kichinev, — dont le .propriétaire du journal local, Paul Krouchevane, publiait des propos antisémites à longueur de pages, avant d’être le premier éditeur des Protocoles des Sages de Sion.

Dans le contexte révolutionnaire de 1905, cent cinquante pogroms environ eurent lieu ; toutes les classes de la population y participaient : cheminots et postiers en première ligne, mais aussi ouvriers et paysans, ceux-ci ramassant souvent tout ce qui traînait par terre. Les professions libérales n’étaient pas non plus absentes de ces mouvements.

Le pogrom institue un moment de rupture des liens sociaux habituels : il pouvait ainsi arriver que ceux-là même qui pillaient les biens juifs cachent pourtant chez eux des Juifs en fuite.

Entre 1906 et 1916, près de 3000 brochures et livres antisémites furent publiés avec l’appui financier du Tsar Nicolas II.

La troisième vague de pogroms se déroula entre 1917 et 1921. Environ 60000 Juifs périrent dans la fureur antijuive des armées blanches et des bandes ukrainiennes qui rivalisaient de cruauté avec l’armée. « L’acharnement antijuif des troupes avait atteint une sorte de fureur enragée contre laquelle on ne pouvait rien entreprendre. » (Mémoires du général Dénikine ).

 

Lecture

  • Léon POLIAKOV, Histoire de l’antisémitisme, IV, Calmann-Lévy, 1977.
  • Encyclopaedia Judaica, article « Pogroms », Jérusalem 1971, t. XIII, p. 694-701.

 

Article extrait du livre de Lydia Flem, Le Racisme, M.A. éd, préface de Léon Poliakov, 1985 (épuisé).

Nazisme

NAZISME

Tout a commencé dans la légalité. Hitler adhère en 1919, après l’humiliation de la défaite, au Deutsche Arbeitpartei qui voit certains membres de l’armée le soutenir. En 1921, les premières Sections d’assaut ou S.A. sont mises sur pied avec pour mission d’intervenir dans les réunions communistes et de créer une atmosphère de violence dans la république de Weimar.

Au sein de son parti — devenu N.S.D.A.P., National Sozialistische Deutsche Arbeitpartei, Hitler cherche déjà à exercer une autorité sans partage. Il veut conquérir le pouvoir, défendre l’Allemagne et la race aryenne. Doctrinaire et opportuniste, il a compris le rôle fondamental des masses populaires et saura mêler les vieux mythes germaniques à la modernité. L’horreur et l’efficacité de sa tyrannie tiendront dans l’utilisation habile de tous les instruments de manipulation pour renforcer son charisme et sa puissance. Croix gammée et étoile jaune, aigle emprunté à l’empire, défilés, affiches, cinéma, discours martelés au son des bottes, caractères gothiques, jeunesse en uniforme… rites et symboles rendent inutiles le recours à la contrainte ou l’intelligence, ils parlent d’eux-mêmes, emportent l’adhésion, imprègnent tout le quotidien.

Le 9 novembre 1923, c’est la tentative de putsch à Munich. Accusé de haute trahison, Hitler se prétend au contraire le meilleur des Allemands, « celui qui voulait offrir au peuple allemand le meilleur de toutes choses ». La presse le transforme en champion de la cause nationale. Condamné à cinq ans de prison, il rédige Mein Kampf. En 1925, il retrouve la liberté et sa place à la tête du parti. Pour contre-balancer l’influence des S.A., il crée une force à sa disposition personnelle, les S.S. ou Schutzstaffeln. Il est à tout moment prêt à saisir les occasions politiques. Avec la Grande crise de 1929 qui gagne l’Allemagne, les nazis enregistrent leurs premiers succès électoraux. De 12 députés en 1928, le parti nazi obtient 107 sièges en 1930 et un poste de ministre de l’Intérieur de l’état de Thuringe.

Le 30 janvier 1933, Adolf Hitler est nommé Chancelier par le maréchal Hindenburg et présente son gouvernement à la presse. Hermann Göring et Joseph Goebbels sont respectivement chef du gouvernement de la Prusse et ministre « pour l’information du peuple et la propagande ». Arrivés au pouvoir par la voie légale, les nazis la rejettent tout aussitôt : Cent cinquante journaux sont interdits, la police reçoit le l’ordre de ne pas intervenir contre les S.A. devenus maîtres de la rue, les libertés fondamentales sont supprimées (inviolabilité du domicile, du secret postal, liberté d’expression, de réunion, d’association, du droit de propriété). Les partis politiques semblent aveuglés, ils ne mesurent pas l’étendue de la répression qui s’installe. Communistes, socialistes, libéraux et même l’Église catholique, personne ne réagit aux arrestations et sévices contre les membres de l’une ou l’autre organisation. Personne ne semble imaginer se solidariser pour résister à cette peste brune. Le judaïsme allemand lui-même pense que le péril n’est fort relatif et ne concerne que quelques Juifs de l’Est. Les syndicats acceptent même de défiler le 1er mai mais le lendemain, toutes les maisons syndicales sont occupées par les S.A. et les dirigeants emprisonnés. Les partis sont frappés ou dissouts ; une loi interdit la création de nouveaux partis politiques.

Une reconnaissance internationale est acquise en juillet 1933 par le pacte signé avec la France, l’Italie et la Grande-Bretagne et le concordat avec le Saint-Siège. Les Jeux Olympiques de 1936 en sont le signe le plus éclatant.

Hitler veut posséder un pouvoir absolu, il fait exécuter les S.A., c’est la « Nuit des longs couteaux » du 30 juin 1934.

Hitler veut la conquête d’un nouvel espace vital à l’Est et sa germanisation impitoyable. Il veut aussi modeler la jeunesse et rend obligatoire le service dans la Hitlerjungend, sélectionne des jeunes filles conformes à des critères « raciaux » pour en faire les reproductrices de la « renordisation ».

En septembre 1938, c’est la rencontre à Munich avec Mussolini, Edouard Daladier et Neville Chamberlain ; Les Allemands prennent possession des Sudètes que l’Occident leur a donné et l’Europe va basculer dans la guerre.

La guerre fait partie des moyens qu’entend utiliser le régime nazi pour arriver à ses fins, de même que le racisme en est une donnée centrale.

Les lois raciales de Nuremberg des 15 et 16 septembre 1935 ont codifié la politique antijuive mais en janvier 1942, les nazis ne se contentent plus d’obtenir l’émigration et le transfert de cette minorité sur laquelle se cristallise tant de haine, dorénavant c’est une « solution définitive de la question juive pour l’ensemble de l’Europe » qui est envisagée.

Nourri dès sa jeunesse viennoise de pamphlets antisémites, de textes pseudo-scientifiques à propos du « mythe aryen », Hitler va incarner les délires verbaux de ses prédécesseurs et organiser industriellement le génocide. Héritier d’un antisémitisme séculaire, il planifie l’horreur avec la complicité passive, ou l’omission, des nations civilisées. Churchill refuse de considérer les mesures antijuives comme un obstacle à l’entente germano-britannique, en 1938, la Suisse cherche à empêcher les émigrés juifs de franchir ses frontières ; l’Amérique latine après avoir accueilli des réfugiés restreint l’immigration juive ; d’après un sondage, 87% des Américains interrogés refusent d’ouvrir plus largement leurs portes aux Juifs européens, … On connaît aussi le rôle du gouvernement de Vichy dans cette tragédie. Ce sont les Juifs « étrangers »  — polonais et allemands principalement — que Vichy veut livrer aux nazis. La xénophobie se mêle à l’antisémitisme français, qui distingue l’ « Israélite », « bon Juif » assimilé, du « mauvais Juif », venu de l’étranger. L’amiral Darlan déclare que les Juifs apatrides qui se sont « abattus » sur le territoire français ne l’intéressent pas mais que les bon vieux Juifs de France doivent recevoir protection. Les autres peuvent mourir. Ce que Louis Gernet résume en 1943 par cette phrase : « On a pu observer un antisémitisme d’académicien qui est d’ailleurs à peu près le même que celui des voyous ».

 

Lecture

 

–       Pierre AYÇOBERRY, La question nazie, les interprétations du national-socialisme. 1922-1975, Seuil, 1979.

–       Saul FRIEDLANDER, Reflets du nazisme, Seuil, 1982.

–       Daniel GASMAN, The Scientific Origins of National Socialism, Londres, Macdonald, 1971.

–       Georges GORIELY, Hitler prend le pouvoir, Complexe, Bruxelles, 1982.

–       Alfred GROSSER, Dix leçons sur le nazisme, (dir.), Complexe, Bruxelles, 1984.

–        Dominique PELASSY, Le Signe nazi : l’univers symbolique d’une dictature, Fayard, 1983.

–       Léon POLIAKOV, Bréviaire de la haine. Le Troisième Reich et les Juifs, Calmann-Lévy, 1979.

 

Cf. Antisémitisme, Fascisme, Génocide.

 

 

 

Immigration (Racisme)

IMMIGRATION

Aux migrations politiques ont succédé les migrations économiques, liées au marché international du travail. C’est devenu un fait structurel de la société industrialisée post-coloniale. Et bien que la crise frappe les pays occidentaux depuis 1974, les travailleurs étrangers continuent d’occuper les emplois délaissés par la main-d’œuvre nationale. L’Europe compte actuellement plus de douze millions d’immigrés dont quatre millions environ en France. Dépourvus de droits politiques, souvent lésés dans leurs droits sociaux, ils sont aussi souvent les boucs émissaires de la crise. On les accuse de « voler le pain » des Français, de s’enrichir sur le dos de la Sécurité sociale, etc., alors qu’ils sont essentiels à l’économie actuelle et que pour la seule année 1981 la Caisse nationale d’Allocations familiales a réalisé trois milliards de bénéfice grâce à la différence entre les cotisations payées par les immigrés et les prestations qu’ils ont effectivement touchées.

Sur quatre millions d’immigrés, on compte 1,4 million de jeunes âgés de moins de dix-huit ans nés en France ou arrivés avant l’âge de dix ans et qui, selon la loi, deviendront automatiquement Français à leur majorité. L’immigration a pris un caractère familial qu’elle n’avait pas, ce qui en change profondément le caractère. Dorénavant, il ne s’agit plus d’une population mouvante, animée de mouvements de flux et de reflux mais bien d’un groupe qui se stabilise et qui, pour une bonne part, ne songe plus au retour en terre natale.

Une enquête effectuée pour le M.R.A.P. par la SOFRES, du 25 janvier jusqu’au 4 février 1984, donne de précieuses indications sur l’opinion et les sentiments des Français à l’égard des immigrés. 44% de la population française côtoie des immigrés sur leur lieu d’habitat et 26% au travail ; la moitié déclare en avoir parmi leurs amis et un quart dans leur famille. Malgré cette relative proximité, 3 personnes sur 4 ignorent le poids réel de l’immigration, ils en surévaluent le pourcentage. La plupart des personnes interrogées pensent aussi qu’il y a proportionnellement plus d’immigrés aujourd’hui  qu’en 1930, ce qui est inexact. Ceux qui estiment en trop grand nombre les étrangers appartiennent soit à l’extrême-droite, soit à la catégorie de gens qui sont dans une « proximité non choisie » avec ces derniers.

Parmi les différentes communautés d’immigrés vivant en France, ce sont les Européens (Espagnols, Italiens, Polonais et Portugais), avec les Antillais, qui sont considérés comme les mieux intégrés. Les immigrés d’Afrique sont jugés plutôt mal intégrés dans la société française et les Algériens avec les Gitans sont très nettement perçus par plus de 50% comme très mal intégrés. Mais qu’est-ce que l’intégration ? Et comment y parvenir ? Pour 43% des personnes interrogées, c’est une question de temps, pour 49%, au contraire, les immigrés sont trop différents des Français et n’arriveront pas à faire partie de la société nationale. Pour près de la moitié de l’échantillon, c’est aux immigrés de faire un effort pour vivre comme les Français ; au contraire, ce sont les plus jeunes, les plus instruits et les électeurs de gauche qui souhaitent voir les Français faire des efforts pour mieux accepter les immigrés.

La fréquentation « non choisie » d’immigrés provoque souvent des réactions défensives et hostiles à leur égard. En comparaison avec la moyenne, on estime plus fréquemment le taux d’immigration trop élevé, l’intégration impossible et on refuse plus souvent le droit de vote, le supérieur hiérarchique immigré, etc.

La question de l’immigration est un problème social, national, culturel, juridique, incontournable aujourd’hui pour plusieurs pays européens dont la France. Cette question de société s’inscrit, particulièrement dans le cas de l’immigration maghrébine, dans les suites de la décolonisation. Les souvenirs sont encore clairs, les blessures pas toujours cicatrisées ; la droite et l’extrême-droite n’hésitent pas à susciter les passions, et plutôt que de proposer des stratégies réalistes et lucides, utilisent des arguments racistes à des fins démagogiques et électoralistes. Les média jouent, à cet égard, un rôle ambigu ; l’énoncé « objectif » de crimes racistes, rarement suivi des procès et des condamnations qu’ils devraient entraîner, donne une connotation de fatalité inévitable, de tolérance ou d’indifférence face à ces faits. Entre 1971 et 1978, une cinquantaine de meurtres d’Algériens à été commise, le double même selon certaines sources. Moins fréquentes entre 1974 et 1981, les violences racistes redeviennent abondantes à partir de 1982. Aujourd’hui, le racisme tue en France.

Lecture

–       Michel MARIÉ et Tomaso REGAZZOLA, Situations migratoires ou la fonction miroir Galilée,  1976.

–       Michel MARIÉ, « De l’immigré-colonial à l’immigré-marchandise ou l’espace d’une amnésie ? » in Annuaire de l’Afrique du Nord, XX, 1981, p. 333-347.

–       « L’Immigration maghrébine en France. Les faits et les mythes », n° spécial des Temps Modernes, mars-avril-mai, 1984.

–       Sondage SOFRES commenté par Véronique de Rudder, in Différences, mars 1984.

Cf. Colonisation, Etranger, Seuil de tolérance.

Article extrait du livre de Lydia Flem, Le Racisme, M.A. éd, préface de Léon Poliakov, 1985 (épuisé).            

CULTURE

CULTURE

« Pendant tout le XIXe siècle et la première moitié du XXe, on s’est demandé si la race influençait la culture et de quelles façons. Après avoir constaté que le problème ainsi posé est insoluble, nous nous apercevons maintenant que les choses se passent dans l’autre sens : ce sont les formes de culture qu’adoptent ici ou là les hommes, leurs façons de vivre telles qu’elles ont prévalu dans le passé ou prévalent encre dans le présent, qui déterminent, dans une très large mesure, le rythme de leur évolution biologique et son orientation. Loin qu’il faille se demander si la culture est ou non fonction de la race, nous découvrons que la race — ou ce que l’on entend en généralement par ce terme — est une fonction parmi d’autres de la culture. »

Claude Levi-Strauss,

Le Regard éloigné, p. 35,

Plon, 1983.

« Un anthropologue est-il à même de donner l’indice céphalique d’un peuple chez lequel régnerait la coutume de déformer par des bandages la tête des enfants dès leurs premières années ? »

S. Freud,

L’Avenir d’une illusion,

PUF, 1980, p. 67.

« Toute culture est par essence paranoïa. Elle n’assure son identité narcissique que par la négation des autres. »

André Green,

« Un, autre, neutre »,

Nouvelle Revue de Psychanalyse,

n°13, 1976, p. 76.

«  La culture (si l’on entend par là les valeurs publiques, les valeurs standardisées d’une communauté) sert de médiatrice à l’expérience individuelle. Elle lui fournit d’avance certaines catégories de base, un schéma positif dans lequel s’insèrent, en bon ordre, idées et valeurs (…) Tout système de classification peut produire des anomalies, et toute culture doit un jour ou l’autre faire face à des événements qui semblent défier ses idées préconçues (…) La culture cherche à réduire une ambiguïté en adoptant l’une ou l’autre des interprétations possibles. Par exemple, la ligne de démarcation qui sépare les êtres humains des animaux est menacée chaque fois que naît un monstre. Elle est rétablie dès que l’on colle sur ce phénomène une étiquette quelconque. Ainsi les Nuer considèrent les petits monstres comme des bébés hippopotames, nés accidentellement chez les hommes. Le phénomène ainsi étiqueté, ils savent ce qu’il faut faire. Ils déposent doucement le petit monstre à sa place, c’est-à-dire dans le fleuve. »

Mary Douglas,

De la souillure, p. 58-59,

Maspero, 1981.

 

Autre (Racisme)

AUTRE

 

« On peut découvrir les autres en soi, se rendre compte de ce qu’on n’est pas une substance homogène, et radicalement étrangère à tout ce qui n’est pas soi : je est un autre. Mais les autres sont des je aussi : des sujets comme moi, que seul mon point de vue, pour lequel tous sont là-bas et je suis seul ici, sépare et distingue vraiment de moi. Je peux concevoir ces autres comme une abstraction, comme une instance de la configuration psychique de tout individu, comme l’Autre, l’autre ou autrui par rapport au moi ; ou bien comme un groupe social concret auquel nous n’appartenons pas. Ce groupe à son tour peut être intérieur à la société : les femmes pour les hommes, les riches pour les pauvres, les fous pour les « normaux » ; ou lui être extérieur, une autre société donc, qui sera, selon les cas, proche ou lointaine : des êtres que tout rapproche de nous sur le plan culturel, moral, historique ; ou bien les inconnus, des étrangers dont je ne comprends ni la langue ni les coutumes, si étrangers que j’hésite, à la limite, à reconnaître notre appartenance commune à une même espèce. »

Tzvetan Todorov,

La Conquête de l’Amérique

La question de l’autre,

Seuil, 1982, p. 11.

 

Article extrait du livre de Lydia Flem, Le Racisme, M.A. éd, préface de Léon Poliakov, 1985 (épuisé).

 

 

 

 

 

« La difficulté d’être un être humain reste entière et inchangée : condamné à l’altérité, à la différenciation sexuelle, à la mort ».

Entretien avec Joyce Mc Dougall,

In Nouvelle Revue de Psychanalyse.

29, 1984, p. 135.

 

 

 

 

L’autre est-il un dieu ou une bête ?

« Dans les grandes Antilles, quelques années après la découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquête pour rechercher si les indigènes avaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à immerger des blancs prisonniers, afin de vérifier, par une surveillance prolongée, si leur cadavre était ou non sujet à putréfaction. Cette anecdote à la fois baroque et tragique qui illustre bien le paradoxe du relativisme culturel ».

Claude Lévi-Strauss,

Anthropologie structurale deux,

Plon 1973.

 

 

 

« L’illusion de la fusion est douce mais c’est une illusion et sa fin est amère ; reconnaître l’autre comme autre permet de mieux l’aimer ».

Tzvetan Todorov,

« Une critique dialogique »,

Le Débat, mars 1984, p. 164.

 

 

 

« La parole charnelle d’un ami me ramena à la raison : tu ne peux pas faire l’économie de l’étrangeté du texte, car il est ce qu’un autre a laissé par son retrait. Tu n’as pas à t’approprier, mais, sur le mode d’une non-coïncidence à jamais irréductible, tu dois remplir de signification ce que l’autre a pensé et qui est là, pour toi, dans la figure d’une demande à penser ».

Patrice Loraux,

« Je ne publierai pas d’anecdote »,

l’Écrit du temps, 3, 1983, p. 23.

 

 

« Il y a en chacun de nous du caché que seul le regard d’autrui peut nous révéler, de l’inouï que seule l’écoute d’un autre peut nous faire entendre ».

Christian David,

« L’Empire du sens »,

in Le Genre humain, 7-8, 1983, p. 235.

 

 

 

« Pour l’être humain, tout processus d’individualisation ne peut se faire en effet que « dans » et  « par » l’autre, ce qui met celui-ci en position de n’être, pour la subjectivité ordinaire, que le semblable légèrement décalé : ressort ambigu de l’identification dont témoigne l’expression « nous autres », mais aussi fondement de tout mécanisme projectif ».

Francis Martens,

« Le miroir du meurtre ou la synagogue dévoilée » in Le Racisme.

Mythe et sciences, Complexe, 1981, p. 62.

 

 

 

« Simplement, quand je ne comprends pas, je ne récuse pas, je ne me détourne pas. J’attends ».

 

Georges Dumézil,

« Sur Nostradamus »,

Le Débat, mars 1984, p. 180.

 

 

 

«  Nous donc — mais au fait, qui est-ce, nous ? »

Plotin,

Ennéades, VI, 4, § 14.

 

 

Et quand « nous » devenons les autres des autres, tels ces premiers navigateurs européens saisis par le regard d’un Chinois du XVIe siècle :

 

« Ces hommes de l’Océan, ainsi qu’on les désigne, sont des animaux de taille élevée. Leurs yeux profondément enfoncés dans leur orbites et leur nez est en forme de bec d’oiseau. La partie inférieur de leur visage, le dos de leurs mains et, semble-t-il, leur corps tout entier sont recouverts d’une épaisse toison de poils frisés, ce qui les fait ressembler aux singes des forêts du Sud. Le plus étrange, toutefois, est que, tout en étant incontestablement des hommes, ils ne semblent présenter aucune de leurs facultés mentales. Comparativement à eux, le plus bestial des paysans est infiniment humain. Cependant, des hommes de l’Océan se déplacent et voyagent avec une assurance qui est celles d’hommes expérimentés et, à certains égards, ils sont extrêmement intelligents. Ainsi il est tout à fait plausible qu’ils soient accessibles à l’éducation et que, à force de patience, on leur inculque les manières d’un être humain ».

« Lettre d’un Chinois à son fils »,

cité par Michel Adam in « Racisme

et catégories du genre humain »,

L’Homme, avril-juin 1984, p. 86.

 

 

 

 

 

 

 

 

Aryen

ARYEN

Au début du XIXe siècle, les savants occidentaux se cherchent de nouveaux ancêtres du côté de l’Inde et des montagnes de l’Asie. En 1771, le Français Anquetil-Duperron part en Inde et ramène la traduction du Zend-Avesta, l’Anglais William Jones étudie le sanskrit et constate sa parenté avec le grec et le latin dès 1788. Le mythe d’une race aryenne allait bientôt enflammer l’Allemagne romantique.

Dans son Éssai sur la langue et la sagesse des Indiens (1808), Frédéric Schlegel décrivait avec beaucoup d’imagination des conquérants descendus de l’Himalaya pour coloniser et civiliser l’Europe. L’Inde était devenue le berceau des civilisations et le sanskrit, la première langue de l’humanité. Le but de cette réécriture de l’histoire était de gommer les ancêtres hébreux de l’Occident, représentés par les Juifs contemporains, en opposant les « Sémites »  aux  « Aryens » ou « Indo-Germains ».

L’indianiste, Christian Lassen, un élève de Schlegel, écrivait vers 1845 : «  Parmi les peuples caucasiens, nous devons certainement accorder la palme aux Indo-Germains. Nous ne pensons pas que cela est dû au hasard, mais nous croyons que cela doit découler de leurs talents supérieurs et plus vastes. L’histoire nous apprend que les Sémites ne disposent pas de l’équilibre harmonieux de toutes les forces de l’âme qui caractérise les Indo-Germains. La philosophie, elle aussi, n’est pas l’affaire des Sémites ; ils n’ont fait que prendre quartier chez les Indo-Germains, et encore seuls les Arabes l’ont-ils fait. Leurs représentations et leurs vues absorbent trop leur esprit pour qu’ils puissent s’élever avec sérénité vers la contemplation des idées pures… »

Confondant parenté linguistique et origine ethnique commune, ou « race » comme on commençait à le dire, le mythe aryen se nourrit des nouvelles découvertes de la philologie, de la linguistique et plus tard de l’anthropologie physique. Mais désormais les mots échappent aux savants. Ainsi, Max Müller, un spécialiste du sanskrit, après avoir fait des conférences au cours desquelles il évoquait l’avancée triomphante des Aryens, « les maîtres de l’histoire » se rétracta en 1872, en précisant : « Que de malentendus, que de controverses tiennent à ce qu’on conclut à partir de la langue, au sang, ou à partir du sang à la langue… Il existe des langues aryennes et sémitiques, mais il est antiscientifique, de parler, à moins de se rendre compte de la licence qu’on se donne, de race aryenne, de sang aryen, ou de crânes aryens. » Mais il était déjà trop tard. Le mal était fait. Les mots n’effacent pas les mots.

En France, Gobineau et Renan perpétuent cette confusion entre race, langue et religion. La politique s’étant emparée de ces catégories savantes, Renan, comme son ami Max Müller, fait marche arrière. Il déclare à la Sorbonne le 11 mars 1882 : «  De nos jours on commet une erreur plus grave : on confond la race avec la nation, et l’on attribue à des groupes ethnographiques ou plutôt linguistiques, une souveraineté analogue à celle des peuples réellement existants ».

Invention à la fois académique et idéologique, ce mythe aryen, qui s’était développé dans l’Europe du XIXesiècle, inspira le régime nazi. Aussi absurde que cela puisse paraître, c’est l’appartenance à un groupe supposé « Sémite » qui a décidé, entre 1940 et 1944, de la mort de millions d’Européens. Mais que signifient les mots « sémitique » et « aryen » ?

Le mot « sémitique » renvoie d’abord à un groupe de langues parmi lesquelles on trouve l’hébreu, le syriaque, une des premières langues littéraires chrétiennes, et l’arabe. Quant au groupe de langues souvent dites « aryennes » au XIXesiècle, plus proprement dénommées « indo-européennes », elle recouvrent à quelques exceptions près, dont le hongrois et le finnois, les langues dispersées entre l’Inde et l’Europe. Là où l’ « indo-européen » est une notion essentiellement linguistique, l’usage idéologique du terme « aryen » renvoie aux théories racistes du XIXe siècle.

Pour ce qui est du mot àrya, il est attesté dans l’aire linguistique de l’ancien indo-iranien et désigne le terme que s’appliquent à eux-mêmes les hommes libres par opposition aux esclaves. Comme le rappelle Emile Benveniste, il est banal que le nom d’un groupe se donne à lui-même, pour se distinguer de ses voisins, affirme sa supériorité sur un autre groupe. Cependant, le même Benveniste précise, et conclut, à propos du thème ari, arya—, qui a entrainé tant de confusion : « On a souvent pensé à une relation de ari avec le préfixe ari — qui marque en sanskrit un degré éminent, et qui peut correspondre au préfixe grec ari — indiquant aussi l’excellence ; et comme à ce préfixe gr. ari se rattache probablement le groupe de àristos « excellent, suprême », on obtiendrait pour ari —, arya— un sens tel que « éminent, supérieur ». Mais rien n’impose ce rapprochement ».

Lecture

–       Émile BENVENISTE, Le Vocabulaire des institutions indo-européennes. Vol. 1, Économie : parenté, société, Minuit, 1969, p. 369-373.

–       Maurice OLENDER, « Au sujet des Indo-Européens » in Archives de Sciences, Sociales des Religions, n°55/2 1983, p. 163-167.

–       Léon POLIAKOV, Le mythe aryen, Calmann-Lévy, 1971.

–       Salomon REINACH, L’Origine des Aryens. Histoire d’une controverse, E. Leroux éd., 1892.

–       Raymond SCHWAB, La Renaissance orientale, Payot, 1950.

–       Catherine WEINBERGER-THOMAS, « Les Mystères du Veda. Spéculations sur le texte sacré des anciens brames au Siècle des Lumières », in Purusàrtha 7, 1983, p. 177-231.

Cf. Antisémitisme, Broca, Chamberlain, Cinéma nazi, Ethnocentrisme, Génocide, Gobineau, Idéologie, Nazisme, Tsiganes, Vacher de Lapouge.

Angoisse devant l’étranger

ANGOISSE DEVANT L’ÉTRANGER

Les psychanalystes reconnaissent chez le nourrisson, autour du huitième mois, une peur passagère et habituelle, provoquée par la perception du visage d’un inconnu, d’un  étranger.

Jusque là, le bébé vivait en symbiose avec sa mère (ou toute personne qui s’occupe de lui en permanence depuis sa naissance) et il souriait volontiers à tout visage humain qui se penchait vers lui. Le petit d’homme est une être inachevé, immature, incapable de subvenir seul à ses besoins. Sa survie dépend totalement des soins et de l’attention qu’un adulte voudra bien lui prodiguer ; cette dépendance émotionnelle l’attache à la personne source de son plaisir et de son déplaisir. Au début de sa vie, le nourrisson se trouve plongé dans un état d’indifférenciation, de toute-puissance hallucinatoire et de fusion avec l’adulte maternant, situation dans laquelle le « je » ne se démarque pas encore du « non-je », le dehors du dedans.

Petit à petit, il émerge de cette symbiose et différencie son corps de celui de sa mère grâce aux traces mnésiques des allées et venues de celle-ci et des expériences de satisfaction qui y sont liées. Il peut alors anticiper avec confiance le soulagement qu’elle apporte à ses besoins.

Au fur et à mesure qu’il devient capable de percevoir la séparation entre lui et l’autre, il peut craindre de perdre la présence maternelle et surtout de perdre son amour.

Lorsqu’un inconnu s’approche de lui, le bébé se trouve déçu dans son désir d’avoir la présence de sa mère. L’angoisse qu’il manifeste alors n’est pas liée au souvenir d’une mauvaise expérience avec un étranger mais à la perception d’une différence par rapport aux souvenirs de sa mère. Cette crainte l’agite chaque fois que celle-ci s’absente ou ne répond pas assez rapidement à ses attentes et ses désirs. La difficulté à patienter, la rancune et même la haine qu’engendre le sentiment de frustration éveillent ses pulsations destructrices. Pour préserver son unité et éviter un conflit avec son « bon objet » maintenant, il va projeter cette agressivité très menaçante, il va la prêter à autrui et particulièrement à tout « autre-que-la-mère » à toute personne qu’il ne reconnaît pas comme familière.

En retour, c’est cet étranger qui va lui apparaître hostile, dangereux, démoniaque et prêt à user de représailles à son égard. Cet « objet persécuteur » est investi de tous les fantasmes de destruction, de toutes les attaques hostiles : empoisonnement, explosion, souillure, anéantissement,… Projetés sur autrui, devenu le miroir de ses propres pulsions, ces mouvements de rage et de colère ne paraissent plus appartenir au « persécuté » mais être nés chez le « persécuteur », ce qui autorise en toute bonne foi une réaction agressive de défense contre cette « intrusion extérieure » qui menace la fragile identité de l’enfant.

Certaines études semblent montrer que cette réaction d’angoisse est moins intense chez les bébés qui ont reçu de leur mère, dans la phase symbiotique, une provision suffisante de confiance et une narcissisme primaire suffisamment solide.

Cette « angoisse du huitième mois », provoquée par la perception soudaine d’un visage inconnu, signe de l’absence de la mère, fait partie d’un développement sain  et nécessaire. Elle signe l’établissement et la reconnaissance de l’objet « mère » comme partenaire humain privilégié et non interchangeable. Dorénavant, l’enfant sait qu’il est lui et qu’il peut perdre ceux qu’il aime et dont il désire la présence. Il découvre le temps et sa durée mais, petit à petit aussi, la possibilité d’imaginer, de rêver, d’évoquer de bon souvenirs pendant l’absence de son objet d’amour et cette absence devient moins angoissante, moins « persécutrice ». Il sait que sa mère va revenir, il a appris à patienter, à trouver du plaisir par lui-même, à s’intéresser à mille choses, à ne pas perdre confiance. Il intériorise l’objet, il est devenu capable de le recréer à l’intérieur de lui-même.

Il devient lentement possible d’unifier, ou du moins d’apprendre à tolérer, l           coexistence de pulsions contradictoires — amour et haine — et d’atténuer le processus de clivage qui séparait l’ « objet persécuteur », la bonne fée de la sorcière ou du diable.

Néanmoins, le développement humain semble ne jamais s’achever complètement et pouvoir sans cesse revenir sur ses pas ou rester infiltré de mécanismes anciens. Ce processus de nature persécutive peut se réveiller tout au long de la vie, chaque fois que des circonstances angoissantes, intérieures ou extérieures, dépassent les capacités à réagir face au difficultés et suscitent une vive intolérance à la frustration et aux affects destructeurs qu’elle fait naître. Alors, la tentation de rendre responsable un bouc émissaire peut réapparaître. Et la peur d’un persécuteur imaginaire (Barbare, juif, Gitan, sorcier, colonisé, immigré…) provoque alors en retour persécutions et violences racistes.

Lecture

–       Lydia FLEM « Les liens du regard » in Le Genre Humain, n°3-4, 1982.

–       Margaret S. MAHLER La Naissance psychologique de l’être humain. Payot, 1980.

–       Francis MARTENS, « Entre chien et loup. Le carré raciste » in Le Genre Humain. N°2, 1982

–       Hanna SEGAL, Introduction à l’œuvre de Mélanie Klein. PUF 1969.

–       René A. SPITZ, De la naissance à la parole, PUF, 1968.

Cf. Autre, bouc émissaire, Envie, Projection, Sorcellerie

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